Carnitine

La carnitine est un composé comprenant une fonction ammonium quaternaire, elle est bio-synthétisée à partir de lysine et de méthionine. Cette molécule intervient au sein de la cellule dans le transport des acides gras du cytosol vers les mitochondries lors du catabolisme des lipides dans le métabolisme énergétique. Cette molécule est souvent vendue en tant que complément alimentaire. La carnitine a été découverte en tant que facteur de croissance de vers de farine (larve de Tenebrio molitor). La carnitine possède deux stéréo-isomères, sa forme biologique est la L-carnitine alors que la forme D est biologiquement inactive.

Production[modifier]

Chez les animaux, la carnitine est synthétisée principalement par le foie et les reins à partir de lysine et de méthionine. La vitamine C (ou acide ascorbique) est essentielle pour la synthèse de carnitine. Pendant la croissance et la grossesse, les besoins de carnitine peuvent dépasser la quantité produite normalement par le corps.

Rôle dans le métabolisme des acides gras[modifier]

La carnitine transporte les longues chaînes acyl des acides gras vers la matrice mitochondriale. Les chaînes acyl y sont catabolysées par β-oxydation (hélice de Lynen) en acétate utilisable afin de former de l'énergie en passant par le cycle de Krebs. Chez certains champignons, la carnitine entre dans une voie de néoglucogenèse. Les acides gras doivent être activés avant de se fixer à la molécule et ainsi former l'acyl-carnitine. L'acide gras libre du cytosol est lié par une liaison thioester à la coenzyme A (CoA). Cette réaction est catalysée par une enzyme : l'acyl-CoA synthétase, le transfert nécessite une ATPase, il y a donc consommation d'énergie provenant d'une liaison à haut potentiel d'hydrolyse.
Le groupe acyl fixé sur le CoA peut à présent être transféré sur la carnitine, et l'acyl-carnitine résultant être transféré à travers la membrane vers la matrice mitochondriale. Les étapes sont les suivantes :
  1. L'acyl-CoA est fixé à la carnitine par la carnitine acyl-transférase I localisée sur la membrane mitochondriale externe.
  2. L'acyl-carnitine formé est "poussé" par la carnitine-acylcarnitine translocase dans l'espace intermembranaire.
  3. L'acyl-carnitine est converti en acyl-CoA (libre dans la matrice) par la carnitine acyltransferase II localisée sur la membrane mitochondriale interne. La carnitine libre retourne dans le cytosol.
Les troubles génétiques engendrant une déficience en carnitine affectent les différentes étapes de ce processus et donc les voies de métabolisation des acides gras.
La carnitine acyltransferase I subit une inhibition allostérique à la suite du malonyl-CoA, un intermédiaire dans la synthèse des acides gras, afin d'éviter un phénomène cyclique entre β-oxydation(catabolisme) et synthèse des acides gras (anabolisme).
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En pointillé orange : membrane externe. En trait plein bleu : membrane interne.

Effets physiologiques[modifier]

Effets sur la masse osseuse[modifier]

Avec l'âge, la concentration cellulaire de carnitine diminue, ce qui affecte le métabolisme des acides gras au sein de différents tissus. Les os sont particulièrement affectés, en effet, il y a un besoin constant de carnitine pour la maintenance du métabolisme des ostéoblastes (cellules permettant le renouvellement des os et la maintenance de la masse osseuse).
Il y a une corrélation proche entre les changements de la concentration plasmatique d'ostéocalcine et l'activité des ostéoblastes. On remarque une diminution de cette concentration chez des sujets atteints d'ostéoporose ou de femmes ménopausées. L'administration de carnitine ou de propionyl-L-carnitine peut faire augmenter le niveau plasmatique d'ostéocalcine qui diminue régulièrement avec l'âge.

Effet antioxydant[modifier]

La carnitine a une action antioxydante, cette action fournit un effet préventif contre la lipiperoxydation des phospholipides membranaires et contre le stress oxydatif induit au niveau des cellules myocardiales et endothéliales. Il s'agit donc d'une molécule réductrice.

Utilisations pharmaceutique possibles[modifier]

Effets sur le diabète[modifier]

La carnitine aurait un effet positif sur le diabète de type II2.

Effet sur la stérilité masculine[modifier]

L'utilisation de carnitine s'est montré prometteuse lors d'un essai contrôlé, en améliorant la qualité du sperme dans certains cas de stérilité masculine3. En effet, la carnitine contribue à la mise en réserve d'énergie du spermatozoïde, lors de son transit épididymaire. Avec un Spermogramme, il est alors possible en analysant le taux de carnitine, de déceler une pathologie obstructive.

En tant que complément alimentaire diététique[modifier]

La carnitine a été parfois utilisée en tant que complément alimentaire dans le but de perdre du poids mais sans preuve scientifique de conséquences positives.

Source[modifier]

Les aliments possédant la plus grande concentration de carnitine sont la viande rouge et les produits laitiers. On en trouve également dans diverses noix, graines (citrouilletournesolsésame), légumes (artichautaspergebetteravebrocolichou de Bruxelleschou cavalierailmoutardegombopersilchou frisé), fruits (abricotbanane) et céréales (sarrasinmaïsmilletavoineson derizseigle, ...).
AlimentQuantité4Carnitine
Steak de bœuf100 g95 mg
Bœuf haché100 g94 mg
Porc100 g27,7 mg
Bacon100 g23,3 mg
Tempehdemi tasse19,5 mg
Morue100 g5,6 mg
Blanc de poulet100 g3,9 mg
Fromage Américain100 g3,7 mg
Crême glacée104 ml3,7 mg
Lait entier104 ml3,3 mg
Avocatde taille moyenne2 mg5
Fromage blanc104 ml1,1 mg
Pain complet100 g0,36 mg
Asperge100 g0,195 mg
Pain blanc100 g0,147 mg
Macaroni100 g0,126 mg
Beurre d'arachide100 g0,083 mg
Riz (cuit)100 g0,0449 mg
Œufs100 g0,0121 mg
Jus d'orange104 ml0,0019 mg
r.wikipedia.org

Etude de la réaction inflammatoire


Les AINS sont les médicaments les plus prescrits au monde pour leurs propriétés analgésiques, anti-pyrétiques et anti-inflammatoires. Leur utilisation est tout de même limitée du fait de leurs effets secondaires en particulier au niveau du tractus gastro-intestinal.
Ces composés peuvent être classés dans quatre catégories selon leurs capacités à inhiber COX-1 et COX-2 : les sélectifs (célécoxib et rofécoxib), les préférentiels (nimésulide, étodolac et méloxicam), les peu sélectifs pourCOX-2 (diclofénac et piroxicam) et les mauvais inhibiteurs qui sont même de meilleurs inhibiteurs de la COX-1 par rapport à la COX-2 (la plupart des salicylates) (Katori M. et Majima M., 2000).

2.3.1. MODE D'ACTION GENERAL

Normalement, l'acide arachidonique, libéré des membranes, s'engage dans le canal hydrophobe de la cyclooxygénase et établit une liaison avec l'Arg 120. La transformation de l'acide arachidonique en PGG2 puis en PGH2commence alors. Les AINS peuvent également s'engager dans ce canal (fig.46) et établir une liaison avec les fonctions amines de l'Arg 120 par leur fonction acide (fig. 47). Dans ce cas, l'acide arachidonique ne peut plus s'y loger et par conséquent, la synthèse des prostanoïdes est inhibée.

fig. 46 : Représentation du canal hydrophobe de la COX-1 (Picot et al., 1994).

fig. 47 : Représentation du flurbiprofène avec le site actif de la COX-1 (picot et al.,1994).
Des études on été menées afin de mieux comprendre le mode de liaison entre les AINS et la cyclooxygénase. Dans le cas du flurbiprofène, des recherches en cristallographie ont pu mettre en évidence les points de reconnaissance. Le flurbiprofène est un AINS non sélectif (fig.48) puisque les CI50 sont de 0,29 µM pour COX-1 et 2,56 µM pour COX-2 (Kurumbail R.G. et al., 1996). Le rapport de sélectivité CI50 COX-2/CI50 COX-1 est de 8,8.

fig. 48 : Le flurbiprofène
La liaison du flurbiprofène est identique sur COX-1 et COX-2. Le flurbiprofène s'engage dans le canal hydrophobe, établit une liaison saline entre son groupement carboxylate et l'Arg 120 ainsi qu'une liaison hydrogène avec la Tyr 355. Le cycle fluorophényle forme des interactions de Van der Waals avec les atomes de la chaîne principale de la Gly 526 et de l'Ala 527. Le cycle phényle interagit avec la Ser 530, site d'acétylation par l'aspirine.
Un modèle équivalent a été développé afin d'expliciter le mode d'action de l'aspirine. L'acide acétylsalicylique fixe l'Arg 120 par son groupement carboxylique et réalise une acétylation irréversible avec la Ser 530 sur COX-1 ovine, avec la Ser 529 pour la COX-1 plaquettaire humaine et avec la Ser 516 pour la COX-2 (Picot D. et al., 1994).
Les conséquences de la fixation de l'aspirine sur COX-1 et COX-2 sont différentes. La sérine acétylée provoque une saillie dans le canal hydrophobe et empêche la formation de PGG2 pour les deux isoformes. Mais, alors qu'elle provoque un blocage complet au niveau du site actif deCOX-1, elle permet la biotransformation de l'acide arachidonique en 15-R-HETE par un nouveau mode de fonctionnement de la COX-2 (Terlain B. et al., 1996).
Le site actif de COX-2 est légèrement plus grand, ce qui lui permet d'accepter des molécules ayant la même structure que les AINS classiques mais avec une partie supplémentaire afin d'augmenter la spécificité vis à vis de la cyclooxygénase-2. La taille de la molécule est donc un des points sur lequel il faut jouer afin d'avoir des anti-inflammatoires sélectifs de la COX-2(fig. 49).

fig. 49 : Schéma permettant d'expliquer l'augmentation de sélectivité des AINS de nouvelle génération en faveur de COX-2.

2.3.2. LES INHIBITEURS PREFERENTIELS

2.3.2.1. Le nimésulide

Le nimésulide (fig. 50) a rapidement été reconnu comme un inhibiteur préférentiel de la COX-2 par rapport à la COX-1 puisqu'il inhibe la COX-2 à des valeurs 20 fois plus faibles que celles de la COX-1 (Nakatsugi S. et al., 1996).
Aux doses efficaces, il agit avec les mêmes résultats sur la douleur dans les cas de polyarthrite rhumatoïde que les AINS habituellement utilisés jusque là , mais dans le cas où l'administration est pratiquée sur du long terme, il est mieux toléré (Cullen L. et al., 1998).
Dans les cas d'inflammation limitée dans le temps comme les tendinites, les douleurs dentaires ou la fièvre, il n'y a pas de différences avec l'utilisation d'AINS classiques (Lecomte J. et al., 1994).
Plus récemment, il a été constaté que les risques de saignements au niveau du tractus gastro-intestinal ne sont pas différents de ceux causés par l'utilisation des AINS d'ancienne génération (Garcia Rodriguez L.A. et al., 1998).

fig. 50 : Le nimésulide.

2.3.2.2. L'étodolac

L'étodolac (fig. 51) a montré dans les études in vitro une spécificité 10 fois plus forte pour la COX-2 par rapport à la COX-1 (Glaser K. et al., 1995). Les études cliniques ont montré une réelle efficacité dans les cas de polyarthrite rhumatoïde sans pour autant amener des effets indésirables (Schnitzer T.J. et Constantine G., 1997), il est également efficace dans les cas de douleurs dues à une intervention au niveau dentaire. Ses propriétés analgésiques durent plus longtemps en comparaison avec l'aspirine (Gaston G.W. et al., 1986).

fig. 51 : L'étodolac

2.3.2.3. Le méloxicam

Le méloxicam (fig. 52) a également montré une sélectivité 3 à 12 fois plus élevée envers la COX-2 par rapport à la COX-1 dans les études in vitro(Engelhardt G., 1996, Ogino K. et al., 1997) et a montré in vivo chez l'animal un faible pouvoir à induire des ulcères (Ogino K. et al., 1997).
Ce médicament utilisé dans les cas de polyarthrite rhumatoïde est aussi efficace que les autres AINS sans qu'il ait été constaté d'agrégation plaquettaire et les effets secondaires au niveau gastrique sont peu nombreux (Hawkey C. et al., 1998).

fig. 52 : Le méloxicam

2.3.3. LES INHIBITEURS SELECTIFS

2.3.3.1. Le célécoxib


fig. 53 : Le célécoxib
Le célécoxib (fig. 53) est 375 fois plus sélectif vis à vis de la COX-2 que pour la COX-1 (Lipsky P.E., Isakson P.C., 1997, Seibert K. et al., 1994).
Il n'a pas d'effet sur l'agrégation plaquettaire, des études approfondies ont montré qu'il n'y avait pas de formation d'ulcères dans les cas d'administration prolongée. Il est employé dans des traitements de longue durée comme la polyarthrite rhumatoïde ou de courte durée comme lesdouleurs dues à des courbatures, des tendinites ou des douleurs dentaires(Mac Adam B.F. et al., 1999).

2.3.3.2. Le rofécoxib

Le rofécoxib (fig. 54) est comme le célécoxib, hautement spécifique de laCOX-2 par rapport à la COX-1, environ 80 fois plus sélectif (Warner T.D. et al., 1999).
Il a des propriétés anti-inflammatoires dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde, anti-pyrétiques et analgésiques pour des douleurs locales comme un mal de dent ou des douleurs plus généralisées. Cet effet analgésique serait même supérieur à celui produit par le célécoxib. Aucun effet secondaire n'a pu être mis en évidence (Hawkey C. et al. 2000).

fig. 54 : Le rofécoxib

PRESCRIPTION DES ANTI-INFLAMMATOIRES NON STÉROÏDIENS


Ph. Bertin P. Vergne
Sommaire de l'article

LA CASCADE DE L'ACIDE ARACHIDONIQUE ET LE NIVEAU D'ACTION DES AINS
LE ROLE DES PROSTAGLANDINES ET L'INTERET DE LA DECOUVERTE RéCENTE DES DEUX ISOFORMES COX 1 ET COX 2 DE LA CYCLO-OXYGENASE
QUELQUES DONNEES SIMPLES DE PHARMACOLOGIE EXPLIQUANT CERTAINES REGLES ESSENTIELLES DE PRESCRIPTION DES AINS
PERSPECTIVES THERAPEUTIQUES ANTI-INFLAMMATOIRES
Service de rhumatologie et de thérapeutique - CHU Limoges

Bien que les phénomènes inflammatoires soient multifactoriels, le rôle primordial des prostaglandines pro-inflammatoires (PGE 2, PG I2, etc...) dans la génèse de l'inflammation, de la douleur et de la fièvre reste incontesté. C'est pourquoi les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), médicaments dont un des modes d'action préférentiel est l'inhibition de la synthèse des prostaglandines, sont largement utilisés pour lutter contre l'inflammation et la douleur. Afin d'optimiser leur prescription en pratique médicale quotidienne, il est nécessaire de mieux connaître leur niveau d'action sur la cascade biochimique de l'inflammation ; leurs effets respectifs sur les deux isoformes COX 1 et COX 2 de la cyclo-oxygénase conditionnant leurs effets anti-inflammatoires attendus et leurs effets indésirables ; quelques notions simples de pharmacologie indispensables à la prescription ; les recommandations légales encadrant cette prescription.
 
Enfin, les données actuelles de la recherche dans le domaine des anti-inflammatoires suggèrent une fort probable amélioration thérapeutique en ce domaine mais il faudra attendre l'épreuve du temps et de l'expérience clinique pour savoir si les espoirs actuels se transformeront en réelle avancée thérapeutique.
 
 
LA CASCADE DE L'ACIDE ARACHIDONIQUE ET LE NIVEAU D'ACTION DES AINS
Les AINS ont une action principale, qui en fait d'ailleurs leur spécificité : l'inhibition d'une famille enzymatique nommée "cyclo-oxygénase" (schéma 1). A titre de comparaison, les glucocorticoïdes, médicaments ayant un fort pouvoir anti-inflammatoire, agissent en amont en inhibant la phospholipase A2, mais peuvent aussi inhiber le complexe "cyclo-oxygénase".
Sous le terme habituellement utilisé de cyclo-oxygénase se cache en réalité un complexe enzymatique qui se nomme prostaglandine H2 synthétase (PGHS), fait de l'action successive d'une cyclo oxygénase (COX) et d'une péroxidase (POX).
Après ces deux étapes enzymatiques interviennent, grâce à des enzymes spécifiques de certaines cellules, les synthèses de différentes prostaglandines et thromboxanes (schéma 2).
 
Schéma 1

Schéma 2


Schéma 3

 
LE ROLE DES PROSTAGLANDINES ET L'INTERET DE LA DECOUVERTE RéCENTE DES DEUX ISOFORMES COX 1 ET COX 2 DE LA CYCLO-OXYGENASE
Très schématiquement, les prostaglandines sont responsables de l'homéostasie de certaines fonctions et sont, par ailleurs, lors de situations pathologiques, sécrétées anormalement sous l'effet d'un stimulus pro-inflammatoire : elles génèrent alors la réaction inflammatoire.
Ainsi, physiologiquement, le thromboxane A2 (TX A2) régule l'agrégation plaquettaire, les prostaglandines I2 (PGI2) sécrétées par l'endothélium gastrique confèrent au mucus ses propriétés protectrices de la muqueuse gastrique, et l'action vasodilatatrice des prostaglandines E2 (PGE2) assure le maintien du flux sanguin rénal.
Ces propriétés physiologiques des prostaglandines sont issues de la voie de la cyclo-oxygénase de type 1 (COX 1), isoforme constitutionnelle et non inductible de la cyclo oxygénase, s'exprimant dans l'ensemble de l'organisme à l'état physiologique.
A l'inverse, une stimulation pro-inflammatoire (traumatisme, cytokines...) conduit à la synthèse de PGE 2 et PGI 2 qui sont responsables d'une vasodilatation (générant rougeur et œdème), d'une sensibilisation des nocicepteurs à la bradykinine et l'histamine (responsables de la douleur) et de la fièvre (en co-action avec les cytokines IL1 et IL6).
Cette surproduction de prostaglandines pro-inflammatoires est issue de la voie cyclo-oxygénase de type 2 (COX 2), isoforme inductible de la cyclo-oxygénase, ne s'exprimant qu'au sein du site inflammatoire.
Les AINS inhibent à la fois la COX 2 produisant ainsi leurs effets bénéfiques (effet anti-inflammatoire, antalgique et antipyrétique) et la COX 1 générant ainsi une partie de leurs effets indésirables (pouvoir anti-agrégant plaquettaire allongeant le temps de saignement ; rôle délétère sur la muqueuse gastrique : gastrite, ulcère gastro-duodénal, hémorragie digestive ; baisse du flux sanguin rénal : insuffisance rénale) qui limitent leur utilisation.
Le concept COX 1 et COX 2 schématisé ainsi permet de comprendre les espoirs mis dans l'inhibition sélective (ou préférentielle) de la COX 2. Cette sélectivité peut se définir par le rapport COX 1/COX 2, égal au rapport IC 50 COX 1/IC 50 COX 2 ; l'IC 50 étant la concentration de l'AINS nécessaire à inhiber 50 % de l'activité COX 1 ou COX 2.
Pour un AINS donné, plus le rapport COX 1/COX 2 est élevé, plus cet AINS est préférentiellement actif sur COX 2 ; ceci suggère donc, du fait des données sus-citées, qu'il est potentiellement moins responsable d'effets indésirables, notamment digestifs, qu'un autre AINS ayant un rapport COX 1/COX 2 inférieur. Ces considérations sont extrapolées des données in-vitro et confirmées, dans certains cas, par les données cliniques.
Néanmoins, ces données récentes méritent d'être confirmées par des études ultérieures, portant entre autre, sur des médicaments actuellement en phase de développement et dont la sélectivité sur la COX 2 est nettement supérieure aux AINS actuellement commercialisés.
Les glucocorticoïdes, inhibent, outre la phospholipase A2, la production de cyclo-oxygénase de type 2 (COX 2) mais pas celle de type 1 (COX 1). Cette notion est intéressante et doit être mise en parallèle à l'expérience clinique de la prescription de glucocorticoïdes qui consacre leur moindre toxicité pour la muqueuse digestive, en comparaison aux AINS.
 
 
QUELQUES DONNEES SIMPLES DE PHARMACOLOGIE EXPLIQUANT CERTAINES REGLES ESSENTIELLES DE PRESCRIPTION DES AINS
Dérivés pyrazolés
 
Butazolidine
phénylbutazone

Dérivés indoliques 
 
Indocid
indométacine
 
Arthrocine
sulindac

Dérivés aryl-carboxyliques
Brufen
 
ibuprofène
Cebutidflurbiprofène
Cinopalfenbufène
Naprozynenaproxène
Apranaxnaproxène (sel sodique)
Profénidkétoprofène
Surgam
 
 
 
 
 
 
acide tiaprofénique
Minalfènealminoprofène
Voltarènediclofénac
Lodineétodolac

Oxicams
Feldènepiroxicam
Tilcotilténoxicam

Fenamates
Niflurilacide niflumique
Ponstyl
 
 
acide méfénamique
Tableau 1 : Classification non exhaustive des AINS par famille clinique
GroupePrincipaux AINSRecommandations

1PyrazolésEffets indésirables graves conduisant à une restriction d'utilisation

2Oxicampiroxicam (±ß cyclodextrine)
ténoxicam
méloxicam
aryl carboxyliques
etodolac
fenbufène
fentiazac
nimesulide
Risque élevé ou insuffisamment étudié conduisant à restreindre les indications aux affections rhumatologiques sévères

3Aryl carboxyliques
alminoprofène
flurbiprofène
ibuprofène
kétoprofène
naproxène
acide tiaprofénique
diclofénac
 
Fénamates
acide méfénamique
acide niflumique
 
AINS inscrits en liste II à indication plus large
Tableau 2 : Classification non exhaustive des AINS actuels
L'absorption digestive des AINS (qui sont des acides faibles) est excellente, ce qui leur confère une bonne biodisponibilité par voie orale et limite considérablement l'intérêt des formes parentérales.
La liaison protéique est très forte, souvent supérieure à 99%. Les AINS sont ainsi capables de déplacer d'autres médicaments de leurs sites de fixation protéique lorsqu'ils sont co-prescrits. Ce déplacement protéique conduit à une plus grande fraction libre (partie active du médicament) de la molécule déplacée. Le type même de cette intéraction médicamenteuse est le déplacement des anti-coagulants oraux (anti-vitamines K), générant un risque d'hémorragie : l'association AINS - anti-vitamine K est donc contre-indiquée. Il en est de même avec les anti-diabétiques oraux de type sulfamides.
 
Le métabolisme des AINS est généralement hépatique et l'élimination rénale : ceci conduit à l'extrême prudence chez le sujet âgé, sujet dont les fonctions hépatiques et rénales sont souvent perturbées. La demi-vie plasmatique des AINS conditionne leur rythme d'administration :
- un AINS à demi-vie longue (supérieure à 24 heures) est pris une seule fois par jour,
- un AINS à demi-vie courte (2 à 6 heures) est pris en 3 prises quotidiennes,
- un AINS à demi-vie intermédiaire (12 à 18 heures) est donné en une ou deux prises par jour.
La classique classification "chimique" des AINS (tableau 1) n'a pas d'intérêt pour la prescription pratique de ces médicaments.  
En revanche, la classification des AINS en groupe 1, 2, 3, (et 4) est à prendre en compte actuellement (tableau 2).
 
Le groupe 1 est constitué par les pyrazolés dont les indications sont très restreintes du fait de leurs effets indésirables graves : en pratique la phénylbutazone dont il ne reste qu'une spécialité (Butazolidine ®) est réservée aux poussées de spondylarthropathie en cure courte.
Le groupe 2 comprend les AINS à risque élevé ou encore insuffisamment apprécié (comme par exemple pour les AINS récemment commercialisés qui sont systématiquement inscrits en liste I) : il s'agit des AINS de liste I excepté les pyrazolés. Leur prescription doit être prudente et réservée aux affections rhumatologiques sévères.
Le groupe 3 correspond aux AINS inscrits en liste II dont la prescription peut être plus large du fait d'une meilleure tolérance globale.
Enfin le groupe 4 comprend l'aspirine et les AINS faiblement dosés utilisés comme antalgiques.
Cette classification en quatre groupes peut guider le clinicien dans le choix d'un AINS, en tenant compte aussi de la demi-vie et de la pathologie à traiter.
Néanmoins il est fort probable que dans les années à venir la classification basée sur la sélectivité préférentielle de la COX2 se substituera aux classifications actuelles pour devenir un outil de choix de prescription.
REGLES ELEMENTAIRES DE PRESCRIPTION DES AINS
Les AINS, puissants anti-inflammatoires et antalgiques, sont prescrits dans toutes les conditions cliniques nécessitant de lutter contre l'inflammation ou contre la douleur.
Il faut savoir que si cette classe thérapeutique est la classe la plus prescrite au monde, elle est aussi, malheureusement, celle qui génère le plus d'effets indésirables dont certains peuvent être graves.
Aussi, avant de prescrire un AINS, il faut s'assurer de l'absence de contre-indication (tableau 3) et d'interaction médicamenteuse potentielle (tableau 4) et il est nécessaire de respecter rigoureusement les recommandations d'utilisation (tableau 5) que représentent les références médicales opposables.
 
  • Ulcère gastro-duodénal en évolution
  • Hypersensibilité à un AINS et/ou à l'aspirine
  • Insuffisance hépatique sévère
  • Antécédent allergique (asthme, urticaire, rhinite allergique) favorisé par l'aspirine ou un AINS
  • Enfant (certains AINS peuvent être néanmoins prescrits chez l'enfant)
  • Dernier trimestre de la grossesse ou allaitement
  • Tableau 3 : Principales contre-indications des AINS
    (liste non exhaustive, variable d'un AINS à un autre)
  • AINS et anti-coagulants oraux : contre-indications
  • AINS et antidiabétiques oraux sulfamides : association déconseillée
  • AINS et Méthotréxate à forte dose (>15mg/semaine) : contre-indication
  • AINS et diurétiques : contre-indication,
    et IEC : contre-indication
  • AINS et Lithium : contrôler la lithémie
  • AINS et ticlopidine : contre-indication
  • Tableau 4 : Principales interactions médicamenteuses des AINS
      
     
     
     
     
     
     
     
     
     
    Il n'y a pas lieu de poursuivre un traitement par un AINS lors des rémissions complètes des rhumatismes inflammatoires chroniques et en dehors des périodes douloureuses dans les rhumatismes dégénératifs.
    Il n'y a pas lieu de poursuivre un traitement par un AINS au-delà d'une période d'une à deux semaines et sans une réévaluation clinique dans les lombalgies aiguës et/ou lombosciatiques aiguës et dans les rhumatismes abarticulaires en poussée.
    Il n'y a pas lieu d'associer un anti-ulcéreux (Misoprostol ou Oméprazole) au traitement par un AINS sauf chez les sujets à risque digestif pour lesquels cette association constitue l'une des précautions possibles.
    Il n'y a pas lieu car dangereux, de prescrire un AINS à partir du 6èmemois de la grossesse, sauf indications obstétricales précises.
    Il n'y a pas lieu de prescrire un AINS à des doses supérieures aux doses recommandées.
    Il n'y a pas lieu de prescrire un AINS par voie intra-musculaire au-delà des tout premiers jours de traitement, la voie orale prenant le relais (la voie parentérale ne diminue pas le risque digestif, comporte des risques spécifiques et n'est pas plus efficace au-delà de ce délai).
    Il n'y a pas lieu d'associer un AINS par voie générale à l'aspirine prise à doses supérieures à 500 mg/jour ou de l'associer à un autre AINS, même à doses antalgiques.
    Il n'y a pas lieu, car généralement déconseillé en raison du risque hémorragique, de prescrire un AINS chez un patient sous anti-vitamine K, ou sous héparine ou ticlopidine.
    Il n'y a pas lieu, particulièrement chez le sujet âgé, en raison du risque d'insuffisance rénale aiguë, de prescrire un AINS chez un patient recevant un traitement conjoint IEC-diurétiques, sans prendre des précautions nécessaires.
    Il n'y a pas lieu d'associer un traitement AINS à la corticothérapie, sauf dans certaines maladies inflammatoires systémiques évolutives (cas résistants de polyarthrite rhumatoïde, lupus érythémateux disséminé, angéites nécrosantes).
    Tableau 5 : Les références médicales opposables des AINS
    PERSPECTIVES THERAPEUTIQUES ANTI-INFLAMMATOIRES
    Les prostaglandines ne sont pas les seules molécules impliquées dans l'inflammation. Ainsi de nombreuses cibles thérapeutiques peuvent conduire au développement ultérieur de nouveaux médicaments permettant de lutter contre l'inflammation : par exemple, des médicaments anti-cytokine pro-inflammatoires (anti-IL 1, anti-IL 6, anti-TNF...).
    Néanmoins, des espoirs de progrès considérables sont investis dans le domaine de l'inhibition sélective de la cyclo-oxygénase de type 2. Ces progrès ne naîtront pas de l'activité mais plutôt de la meilleure tolérance des AINS sélectifs pour la COX 2. Plusieurs molécules sont en cours de développement, certaines en phase III. Pour l'une d'elle, le celecoxib, le dossier d'AMM européenne est même déposé.
    Très schématiquement, les données actuelles publiées dans la littérature montrent que les AINS sélectifs COX 2 sont aussi efficaces que les AINS de référence actuellement commercialisés, tant pour l'arthrose que la polyarthrite rhumatoïde.
    Pour la tolérance, certaines études endoscopiques (fibroscopie gastro-duodénale avant et après traitement) suggèrent que le nombre d'ulcères sous celecoxib (inhibiteur sélectif COX 2) est identique à celui sous placebo (de l'ordre de 4 à 5 %), donc très différent de celui sous AINS de référence (de l'ordre de 15 à 20 %).
    Ces données très évocatrices ne permettent pas néanmoins de savoir si le risque de complication grave sous AINS, à savoir les hémorragies digestives, sera plus faible avec les AINS sélectifs COX 2.
    Par ailleurs, les effets indésirables des AINS non liés à l'action sur la COX 1 (comme par exemple les réactions allergiques,) seront forcément identiques pour les AINS sélectifs COX 2 et les AINS actuellement commercialisés.
    Ainsi, la commercialisation proche des AINS sélectifs COX 2 (déjà en cours aux USA) pourrait à court terme modifier notre attitude thérapeutique dans le domaine des anti-inflammatoires, si bien sûr les données cliniques des études de phase III sont confirmées par l'utilisation large et pragmatique de ces médicaments. La prudence et la vigilance sont actuellement toujours de règle.
    Maîtrise Orthopédique n°89 - décembre 1999